A ce sujet, l’Instance nationale d’évaluation auprès du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (INE-CSEFRS) a présenté, mercredi dernier, le bilan du rapport national sur les performances des élèves marocains à partir des données de l’enquête PISA 2018, conduite tous les trois ans par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Cinq axes principaux forment le noyau de cette étude, à savoir l’inclusivité du système éducatif, la performance des enfants marocains, les ressources pédagogiques et matérielles, le développement professionnel et formation initiale, le rôle des inspecteurs et des chefs d’établissements.
En effet, ledit test, passé par 600.000 élèves issus de 79 pays, a démontré que ces élèves n’ont réussi à obtenir que 359 points en lecture, 368 points en mathématiques et 377 en sciences, avec comme moyenne internationale de 487, 489 et 489 respectivement. Un classement qui est illégitime aux yeux de Mohammed Guedira, expert en politique éducative et ingénierie des compétences, et ce, à cause du décalage existant entre le système éducatif marocain et celui des autres pays. (Voir 3 questions à…).
L’égalité des genres s’impose
La cheffe de projet à l’INE-CSEFRS, Amina Benbida, a indiqué que la majorité des élèves cibles, scolarisés au moins en première année du collège, n’atteint même pas le niveau minimal de compétences. Il s’agit d’un constat qui ne semble pas appelé à durer éternellement malgré les retards accusés face aux défis soulevés par ce rapport, a dit l’inspecteur général des affaires pédagogiques et directeur des curricula au ministère de l’Education nationale, Fouad Chafiqi.
« Je ne pense pas que nos enfants soient condamnés à rester dans la situation actuelle », a-t-il ajouté, rappelant que « le ministère de l’Éducation nationale a amorcé, depuis la publication de la vision stratégique de la réforme 2015-2030, un certain nombre d’actions et de projets qui visent à améliorer la situation de l’école marocaine ».
Ledit document évoque ainsi la nécessité de promouvoir une égalité des chances en matière d’apprentissage au Maroc, quelle que soit la situation sociale ou territoriale des élèves, insistant sur l’obligation de la scolarisation des enfants, au moins jusqu’à l’âge obligatoire. « Les filles font mieux que les garçons en compréhension écrite et en sciences, alors qu’en mathématiques, les filles et les garçons ont le même niveau de performance », a fait savoir Mme Benbida.
D’autre part, 13% des élèves réussissent à avoir de bons résultats malgré une situation socio-économique défavorable, a souligné la cheffe de projet, notant que seuls 52% comptent poursuivre leurs études au-delà du baccalauréat ou des études professionnelles, dont 61% de non redoublants, 63% d’ « avantagés », 66% en enseignement privé et 54% vivant en milieu rural, a-t-elle poursuivi.
Taux de redoublement élevé
Abordant le redoublement scolaire, 49% des élèves marocains couverts par ladite enquête ont redoublé au moins une fois durant leur cursus scolaire, sachant que ceux-ci ont un niveau de compétences généralement inférieur à celui des non redoublants. « Nous avons beaucoup de redoublements, mais si l’on compare les chiffres actuels avec ceux des trois années passées, nous allons trouver qu’il y a une amélioration ». Le taux de redoublement s’élève à 63% chez les enfants désavantagés, contre 26% pour les plus avantagés, tandis qu’il est de 51% dans le secteur public contre 22% dans le privé. 58% des garçons âgés de 15 ans ont déjà redoublé contre 39% des filles.
Siham MDIJI
Repères
Réforme éducative : le gouvernement implique les professionnels du secteur
Le gouvernement marocain a approuvé le 10 février trois projets de décrets résultant des contributions obtenues lors de plusieurs cycles de dialogue avec les professionnels du secteur de l’éducation. Chakib Benmoussa avait tenu un dialogue avec les partenaires sociaux du secteur le 18 janvier pour activer le programme gouvernemental, réaffirmant l’engagement du gouvernement à entretenir le dialogue avec les parties concernées. Les décrets visent à résoudre quatre problèmes, dont le premier réglemente l’accès et la promotion des administrateurs de l’éducation. Les modifications de la tutelle concernent également les conseillers dans les centres de conseil et de planification pédagogiques.
Le Maroc s’engage à promouvoir l’éducation inclusive
Abdellatif Miraoui, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche scientifique et de l’Innovation, a exprimé dernièrement le soutien du Maroc aux efforts de l’UNESCO pour la promotion de l’éducation inclusive. Miraoui a souligné que la volonté du Maroc de coopérer avec l’UNESCO se reflète dans son engagement à atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies pour 2030, mettant en avant l’importance du quatrième de ces objectifs, qui concerne la nécessité d’assurer l’égalité et l’inclusivité de la qualité de l’éducation et des opportunités éducatives.
L'info...Graphie
Mobilité internationale
Des bourses Erasmus+ au profit des étudiants marocains
Au titre de l’année universitaire 2021-2022, le Campus d’excellence agroalimentaire internationale (ceiA3) a offert onze bourses de formation aux doctorants, enseignants et chercheurs de différentes universités de plusieurs pays comme le Maroc, l’Argentine, la Colombie, le Chili, l’Equateur et l’Uruguay, pour un montant de 28.560 euros, dans le cadre du programme Erasmus+ de la Commission Européenne (projet KA107), indique le campus dans un communiqué. Le ceiA3 regroupe des universités espagnoles d’Almería (UAL), de Cádiz (UCA), de Córdoba (UCO), de Huelva (UHU) et de Jaén (UJA) et vise à améliorer leur niveau d’excellence dans toutes leurs activités.
Le campus a noué des partenariats de mobilité avec les universités étrangères afin de renforcer les capacités des étudiants, des enseignants et groupes de recherche dans le domaine agroalimentaire.
Rime TAYBOUTA
Scolarité
Le PNEA alerte sur le niveau des étudiants
Tout en s’attardant sur l’attractivité du métier et la formation des enseignants, le Conseil a également publié les résultats de l’enquête relative au Programme national d’évaluation des acquis des élèves (PNEA) concernant le faible niveau scolaire des élèves, spécifiquement de la 6ème année du primaire et de la 3ème année du secondaire collégial.
L’étude a porté sur les apprentissages de 36.808 élèves dans les milieux rural et urbain, dans le public et le privé et dans les écoles communales. Ces résultats reflètent une faiblesse notoire au niveau des acquis chez une bonne partie des élèves à l’enseignement fondamental, à des degrés variés, en langues, en mathématiques et en sciences. Ceci est de nature à engendrer des déperditions à travers l’abandon et le redoublement, impactant ainsi négativement la survie scolaire des jeunes, et anéantissant tous les efforts investis par les pouvoirs publics dans les réformes successives de l’Education.
Outre cela, ledit rapport met en évidence que la performance des élèves scolarisés dans le secteur privé est supérieure à celle des élèves du public. Quelle que soit la matière principale (mathématiques, arabe, français, SVT, physique-chimie), seuls 8 à 9% des élèves de l’école publique ont un niveau satisfaisant contre une moyenne de 50% dans l’école privée.
Il faut cependant souligner que le secteur privé dote ses établissements de ressources et d’infrastructure nécessaires pour attirer le plus d’élèves et de familles disposant des moyens pour payer les frais de scolarité de leurs enfants.
3 questions à Mohammed Guedira
« Il est primordial de simplifier, au moins de 30 à 35%, les programmes scolaires pour parvenir à un enseignement efficace »
- Inégalité des genres dans le milieu scolaire, taux de redoublement élevé, quasi-absence des ressources TIC... Quelle lecture faites-vous des résultats dévoilés par l’enquête PISA 2018 ?
- En tant que spécialiste des politiques éducatives, je conteste cette démarche, car nous ne pouvons, logiquement, pas comparer la performance des élèves marocains, en mathématiques, sciences et compréhension de l’écrit, avec le niveau d’autres jeunes issues de pays développés où le système éducatif est complètement différent.
Nous ne pouvons pas comparer l’incomparable. Les catégories sociaux-économiques sont distinctes, nous n’avons pas le même référentiel d’évaluation, ni la même pédagogie, sans parler de didactique ou de curricula. A mon sens, le classement PISA n’est qu’un indicateur pour une tranche d’âge et ne peut, en aucun cas, refléter le système marocain.
- Le niveau des élèves dans certaines matières s’avère insatisfaisant. Est-ce dû au manque des ressources humaines, matérielles et financières ?
- Le grand problème qui se pose tourne autour du comportement de certains enseignants qui ne savent pas transmettre leur message à l’étudiant et ne lui donnent pas envie d’avoir cette envie d’apprentissage. Il y a excès d’autorité de la part des professeurs qui transforment l’école marocain en un environnement malsain qui crée du stress, de la tension, etc. Ceci dit, aujourd’hui, ce ne sont pas les ressources financières qui manquent, mais les ressources humaines qui évaluent mal leurs responsabilités, devoirs et limites.
- Que proposez-vous pour faire face à ces lacunes ?
- Certes, le ministère de tutelle fournit des efforts colossaux pour l’amélioration du système éducatif, mais nous avons des problèmes de gouvernance et de management. Nous devons, en effet, disposer d’un système de sanctions pour que les acteurs d’enseignement soient dans l’obligation d’opérer dans la transparence. Outre la nécessité de faire de l’élève le centre des préoccupations du système éducatif, il est primordial de simplifier, au moins de 30 à 35%, les programmes scolaires pour parvenir à un enseignement efficace.
Propos Recueillis par S. M.