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Population carcérale : Plus de 2.000 Marocains détenus en France


Rédigé par Siham MDIJI Mardi 1 Mars 2022

Le nombre des étrangers détenus en Hexagone est en constante hausse. Ce dernier est passé à 17.198 en 2021, dont 2.200 Marocains, coûtant environ 700 millions d’euros chaque année au système pénitencier français.



© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
© STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
Les détenus étrangers se font de plus en plus nombreux dans les prisons françaises, en témoigne le dernier décompte de l’administration pénitentiaire française qui a révélé leur nombre en nette progression lors de la dernière décennie. Ce dernier est passé de 17,2% à 25% respectivement de 2011 au 1er octobre 2021. Selon ces statistiques pénales, la population carcérale en France a connu une croissance par rapport à l’année précédente.

Sur 69.173 détenus recensés dans les prisons de l’Hexagone, 17.198 personnes étaient d’origine étrangère, nécessitant une facture annuelle d’environ 700 millions d’euros. Un coût, fixé à 110 euros par jour, pèse lourd sur les finances du système pénitencier et qui englobe les dépenses de restauration, d’eau, de chauffage et les frais de personnel, selon le média français « Le Figaro ».

2.220 Marocains incarcérés en France

Parmi les détenus étrangers les plus présents dans les établissements pénitentiaires, 9.793 sont originaires d’Afrique, soit 56%, 3.472 d’Algérie, 2.220 du Maroc, 1.117 de Tunisie et 2.984 du reste des pays africains, tandis que 1.308 prisonniers sont originaires d’Amérique, principalement du Sud, et 880 viennent du continent asiatique.

Cela dit, les Algériens arrivent à la première place devant les Marocains et les Tunisiens parmi les détenus étrangers originaires d’Afrique recensés dans les prisons françaises en 2021. « Pour moi, ce nombre semble être largement sous-estimé et je suis convaincu qu’il y en a beaucoup plus. Les données sur la nationalité n’ont pas été vérifiées et de nombreux détenus refusent de déclarer leurs origines », a indiqué un responsable de l’administration pénitentiaire interrogé par le média précité.

La même source a fait savoir que seulement une quinzaine de ces détenus font l’objet d’un rapatriement dans leur pays d’origine, faute de mécanismes légaux et à cause d’une procédure administrative fastidieuse. Les personnes de nationalité étrangère incarcérées en France ont majoritairement, a-t-elle ajouté, fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, les excluant de fait des aménagements de peine et des programmes de réinsertion.

« À peine une quinzaine de détenus par an », a souligné une source de l’administration pénitentiaire, qui regrette le recours massif au mandat d’arrêt. « C’est regrettable, car cela permet à ces délinquants d’avoir un casier vierge chez eux », a-t-elle expliqué.

Retour sur la surpopulation des prisons françaises

Les chiffres dévoilés par l’administration pénitentiaire française ont ainsi permis de faire un retour sur la problématique de la surpopulation carcérale en France, notamment suite à la crise sanitaire et des mesures barrières mises en place pour juguler la propagation du Covid-19, à commencer par la distanciation sociale. Preuve en est le fait que de nombreuses associations françaises ont fait part de leur mécontentement face au « 1.000 impacts » sur la dignité humaine et le fonctionnement des établissements pénitentiaires, spécialement durant cette période.

Après le confinement de mars 2020 et des mesures exceptionnelles pour faire de la place en détention, la densité carcérale est passée sous la barre des 100%, ont indiqué certains médias français, faisant observer que des cellules de 9 à 11 m2 sont prévues pour un ou deux détenus en plus souvent d’un troisième, dormant sur un matelas par terre.

La France compte plus de 1.500 « matelas au sol », devenus une des mesures de la densité carcérale. La surpopulation carcérale chronique a valu à la France une condamnation de la Cour européenne des droits de l’Homme début 2020. Elle touche essentiellement les maisons d’arrêt (détenus en attente de jugement et courtes peines), où la densité dépasse les 140 %. Un phénomène auquel font face de nombreux Etats, notamment le Maroc.

Quid du Maroc ?

C’est pour cette raison que la Direction générale à l’administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) a lancé un programme d’urgence pour la construction de nouveaux établissements pénitentiaires.

Ce programme vise à moderniser les structures pénitentiaires par la substitution de nouveaux établissements à 11 établissements vétustes ne garantissant pas les conditions de sécurité et de sûreté, pour résoudre le problème de surpopulation et assurer une couverture partielle de la carte judiciaire du Royaume, ainsi que la mise à niveau et/ou l’extension de 27 autres établissements.

Pour réduire la population carcérale, construire et réhabiliter des établissements pénitentiaires et concrétiser le projet « Prisons productives », la DGAPR entend poursuivre la mise en oeuvre des programmes qui se sont révélés efficaces, a annoncé le délégué général Mohamed Salah Tamek, lors de la présentation du projet de budget de la DGAPR pour l’année 2022, devant la Commission de la justice, de la législation et des droits de l’Homme de la Chambre des Représentants. Ce dernier avait présenté, en novembre dernier, le nouveau plan stratégique pour la période 2022-2026 dans le but de favoriser une nouvelle dynamique au sein de cette institution et atteindre de meilleurs niveaux d’efficacité.

Concrètement, la stratégie repose sur cinq axes fondamentaux consistant à humaniser les conditions d’incarcération, à préparer les détenus à la réinsertion, à garantir la sécurité et la sûreté en prison, à développer les capacités institutionnelles de l’Administration et, enfin, à intégrer l’approche genre et la dimension environnementale dans la gestion pénitentiaire.

Selon M. Tamek, ledit plan revêt une importance toute particulière car agrégeant une série de nouveaux chantiers structurants dont l’opérationnalisation permettrait d’accomplir des changements de fond en mesure de promouvoir réellement le système carcéral.


Siham MDIJI


La situation des prisons au Maroc sous la loupe du CEDHD et du DCAF
 
Le Centre d’Etudes en Droits Humains et Démocratie (CEDHD) et le Centre de Genève pour la Gouvernance du Secteur de la Sécurité (DCAF), en collaboration avec la Délégation Générale à l’Administration Pénitentiaire et à la Réinsertion (DGAPR), ont élaboré un rapport sur la situation des prisons au Maroc couvrant la période 2016-2020 selon une approche fondée sur les droits de l’Homme.

Un communiqué du CEDHD souligne que cette évaluation, premier en son genre dans la région, interroge aussi bien les politiques pénale, financière, sanitaire ou autres choix gouvernementaux en matière de recrutement des fonctionnaires ou de traitement de leurs situations administratives et financières ainsi que l’adéquation des moyens nécessaires à la réalisation des programmes.

Ledit communiqué indique aussi qu’un tel rapport permet de sortir d’une approche classique exclusivement basée sur l’observation de ce qui peut être considéré comme une atteinte aux droits des détenus (es), vers une approche basée sur l’évaluation des politiques publiques sous l’angle des droits de l’Homme. Le présent rapport sera en effet diffusé en langues arabe et française au début de l’année 2022.
 



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