Le Covid-19, ou plus précisément la peur d'être infecté par un virus facilement transmissible et potentiellement mortel, a radicalement changé nos vies, nos économies, nos relations, nos espaces et nos sentiments d'anxiété, de plaisir et de sécurité. Si la pandémie nous affecte tous, son impact se fait particulièrement sentir dans les espaces publics urbains
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Les espaces publics et de rassemblent étaient devenus déserts, les foules et le trafic avaient disparu. A présent, le Maroc est passé au niveau vert grâce à l'amélioration de la situation épidémiologique. Il est enfin temps pour ceux qui sont maintenant vaccinés et qui ont été enfermés à la maison d'abandonner les pyjamas et de sortir de leurs grottes Netflix. Des conditions comme celles-ci suggèrent que les gens seraient impatients de se lancer sur la scène sociale, notamment durant le Ramadan qui a toujours signifié réunions familiales. Mais les villes marocaines sont-elles toutes si désireuses de se replonger dans l'ancienne vie sociale ? « L’Opinion » a collecté des témoignages de personnes issues de différentes villes, dans le but de jeter la lumière sur les expériences de resocialisation.
"Je me sentais isolée et seule pendant la pandémie. Mais l'idée de bavarder dans un café bondé me semble terrifiante maintenant, je crois que c'est l'habitude, je cherche plutôt les endroits calmes pendant ce mois, et heureusement Tanger n'est plus bondée et bruyante comme avant le Covid-19", a déclaré Fatine.M, une étudiante à Tanger.
"Tout comme moi, plusieurs amis à moi ont dit se sentir mal à l'aise à l'idée de revenir à une interaction entre personnes, peu importe leur statut vaccinal. Marrakech avant et après le Covid n'est plus la même", affirme Yassine.B qui habite à Marrakech, notant qu'il souffre d’anxiété sociale depuis le confinement, mais que cela s'est un peu dissipé avec l'ambiance familiale du Ramadan.
Pour Yahya.F, qui fait la navette entre la capitale et la métropole, "Casablanca, et surtout ses quartiers populaires où les cafés sont de plus en plus envahis, a connu plus de mouvements et d'interactions sociales que d'autres villes durant le Ramadan, en particulier Rabat, mais beaucoup moins qu'avant la pandémie".
Ceci s'explique selon Abderrahim Bourkia, écrivain, sociologue et consultant en déviance et en contextes sociaux, par "les sentiments de l’isolement et la solitude qui ont eu le dessus pendant le confinement", d'autant plus qu'on a tous "les ingrédients d’un risque majeur ou mineur sur notre santé mentale. Ce qui fait que même après la stabilité de la situation, on voit que les contacts sont encore limités et que certaines personnes affichent de la méfiance à l’égard de l’ouverture vers les autres".
Pour Meriem El Yazaji, professeure à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Casablanca et Chef du service addictologie au CHU Ibnou Rochd à Casablanca, "le retour aux comportements sociaux d’avant la pandémie n'a pas été enregistré partout au Maroc durant ce mois, un changement expliqué par le sentiment d’aise chez quelques citoyens qui se retrouvent dans l’isolement".
Vie sociale ralentie : quels impacts sur notre santé mentale ?
Les sentiments d'isolement et de solitude engendrent souvent des problèmes de santé mentale. Notre santé mentale a été mise à rude épreuve durant cette crise sanitaire. "Les divorces, les deuils, les morts enterrés sans cérémonie de funérailles et le futur incertain, même si les gens oublient trop vite et passent au quotidien et continuent à vivre le jour au jour, il existe encore des signes compatibles avec ce qu’on appelle un stress post-traumatique", affirme Abderrahim Bourkia.
Quelle vie sociale post-confinement ?
La sécurité publique a désormais une nouvelle facette jusque-là peu reconnue : la santé publique. Nos villes, en tant qu'ensembles sociaux, se sont avérées difficilement résistantes à cette menace inattendue, notamment en matière de resocialisation. Alors, comment les gens peuvent-ils être si seuls et pourtant si nerveux à l'idée de remplir leurs calendriers sociaux ?
Outre le fait que dans la crise actuelle chaque individu est un ennemi potentiel, ce qui a probablement renforcé une société de défense, Abderrahim Bourkia pense que s'il n’y avait pas encore d’engouement comme les ramadans d'avant le covid-19, malgré la stabilité de l’état sanitaire au Maroc, "c'est également à cause de la situation socioéconomique des ménages. La crise sanitaire a replongé un nombre considérable de Marocains dans l’incertain : chômage, suspension de travail et précarité", notant que le Covid-19 a mis en lumière les inégalités sociales même face à une telle calamité, et que "la baisse ou carrément la perte de revenu a impacté le pouvoir d’achat des ménages et pour retrouver l’ambiance d’avant il faudrait encore du temps".
Relations humaines : le Ramadan sauve la donne ?
De tous ces aspects de l'isolement social, un aspect facilement négligé mais insidieux implique la perte du contact physique quotidien qui est un puissant canal de développement et de maintien des liens sociaux. Si nous ne pouvons pas interagir et saluer en touchant, nous manquons quelque chose d'essentiel pour les humains. Cependant, ces habitudes ont, selon les témoignages, repris le dessus au cours de ce mois béni avec la multiplicité des visites familiales.
La pandémie a déstructuré d’une manière ou d’une autre, les relations sociales entre les individus. De même, elle a participé à désamorcer les processus de la sociabilité traditionnelle au sein des familles marocaines, ajoute l'expert, soulignant que " si la distanciation sociale a eu son effet sur la proximité et les liens intimes, le Ramadan a permis de recréer petit à petit les liens sociaux et un retour graduel à la vie normale", notamment durant ses derniers jours.
L'expert indique que malgré le fait que l'isolement a duré et marqué les marocains, "les cafés des quartiers populaires ou même ceux des centres villes ne désemplissaient pas durant les soirées de ce mois sacré. Les soirées sont bien rythmées avec les attroupements autour d’une tasse de thé, café ou autres rafraichissements".
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Les espaces publics et de rassemblent étaient devenus déserts, les foules et le trafic avaient disparu. A présent, le Maroc est passé au niveau vert grâce à l'amélioration de la situation épidémiologique. Il est enfin temps pour ceux qui sont maintenant vaccinés et qui ont été enfermés à la maison d'abandonner les pyjamas et de sortir de leurs grottes Netflix. Des conditions comme celles-ci suggèrent que les gens seraient impatients de se lancer sur la scène sociale, notamment durant le Ramadan qui a toujours signifié réunions familiales. Mais les villes marocaines sont-elles toutes si désireuses de se replonger dans l'ancienne vie sociale ? « L’Opinion » a collecté des témoignages de personnes issues de différentes villes, dans le but de jeter la lumière sur les expériences de resocialisation.
"Je me sentais isolée et seule pendant la pandémie. Mais l'idée de bavarder dans un café bondé me semble terrifiante maintenant, je crois que c'est l'habitude, je cherche plutôt les endroits calmes pendant ce mois, et heureusement Tanger n'est plus bondée et bruyante comme avant le Covid-19", a déclaré Fatine.M, une étudiante à Tanger.
"Tout comme moi, plusieurs amis à moi ont dit se sentir mal à l'aise à l'idée de revenir à une interaction entre personnes, peu importe leur statut vaccinal. Marrakech avant et après le Covid n'est plus la même", affirme Yassine.B qui habite à Marrakech, notant qu'il souffre d’anxiété sociale depuis le confinement, mais que cela s'est un peu dissipé avec l'ambiance familiale du Ramadan.
Pour Yahya.F, qui fait la navette entre la capitale et la métropole, "Casablanca, et surtout ses quartiers populaires où les cafés sont de plus en plus envahis, a connu plus de mouvements et d'interactions sociales que d'autres villes durant le Ramadan, en particulier Rabat, mais beaucoup moins qu'avant la pandémie".
Ceci s'explique selon Abderrahim Bourkia, écrivain, sociologue et consultant en déviance et en contextes sociaux, par "les sentiments de l’isolement et la solitude qui ont eu le dessus pendant le confinement", d'autant plus qu'on a tous "les ingrédients d’un risque majeur ou mineur sur notre santé mentale. Ce qui fait que même après la stabilité de la situation, on voit que les contacts sont encore limités et que certaines personnes affichent de la méfiance à l’égard de l’ouverture vers les autres".
Pour Meriem El Yazaji, professeure à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Casablanca et Chef du service addictologie au CHU Ibnou Rochd à Casablanca, "le retour aux comportements sociaux d’avant la pandémie n'a pas été enregistré partout au Maroc durant ce mois, un changement expliqué par le sentiment d’aise chez quelques citoyens qui se retrouvent dans l’isolement".
Vie sociale ralentie : quels impacts sur notre santé mentale ?
Les sentiments d'isolement et de solitude engendrent souvent des problèmes de santé mentale. Notre santé mentale a été mise à rude épreuve durant cette crise sanitaire. "Les divorces, les deuils, les morts enterrés sans cérémonie de funérailles et le futur incertain, même si les gens oublient trop vite et passent au quotidien et continuent à vivre le jour au jour, il existe encore des signes compatibles avec ce qu’on appelle un stress post-traumatique", affirme Abderrahim Bourkia.
Quelle vie sociale post-confinement ?
La sécurité publique a désormais une nouvelle facette jusque-là peu reconnue : la santé publique. Nos villes, en tant qu'ensembles sociaux, se sont avérées difficilement résistantes à cette menace inattendue, notamment en matière de resocialisation. Alors, comment les gens peuvent-ils être si seuls et pourtant si nerveux à l'idée de remplir leurs calendriers sociaux ?
Outre le fait que dans la crise actuelle chaque individu est un ennemi potentiel, ce qui a probablement renforcé une société de défense, Abderrahim Bourkia pense que s'il n’y avait pas encore d’engouement comme les ramadans d'avant le covid-19, malgré la stabilité de l’état sanitaire au Maroc, "c'est également à cause de la situation socioéconomique des ménages. La crise sanitaire a replongé un nombre considérable de Marocains dans l’incertain : chômage, suspension de travail et précarité", notant que le Covid-19 a mis en lumière les inégalités sociales même face à une telle calamité, et que "la baisse ou carrément la perte de revenu a impacté le pouvoir d’achat des ménages et pour retrouver l’ambiance d’avant il faudrait encore du temps".
Relations humaines : le Ramadan sauve la donne ?
De tous ces aspects de l'isolement social, un aspect facilement négligé mais insidieux implique la perte du contact physique quotidien qui est un puissant canal de développement et de maintien des liens sociaux. Si nous ne pouvons pas interagir et saluer en touchant, nous manquons quelque chose d'essentiel pour les humains. Cependant, ces habitudes ont, selon les témoignages, repris le dessus au cours de ce mois béni avec la multiplicité des visites familiales.
La pandémie a déstructuré d’une manière ou d’une autre, les relations sociales entre les individus. De même, elle a participé à désamorcer les processus de la sociabilité traditionnelle au sein des familles marocaines, ajoute l'expert, soulignant que " si la distanciation sociale a eu son effet sur la proximité et les liens intimes, le Ramadan a permis de recréer petit à petit les liens sociaux et un retour graduel à la vie normale", notamment durant ses derniers jours.
L'expert indique que malgré le fait que l'isolement a duré et marqué les marocains, "les cafés des quartiers populaires ou même ceux des centres villes ne désemplissaient pas durant les soirées de ce mois sacré. Les soirées sont bien rythmées avec les attroupements autour d’une tasse de thé, café ou autres rafraichissements".