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Souveraineté sanitaire : Comment le Maroc se prépare à la période Post-pandémie


Rédigé par Anass MACHLOUKH Lundi 16 Mai 2022

Industrie nationale autonome, système de Santé plus inclusif, meilleure gouvernance du médicament, promotion de la recherche scientifique, autant d’objectifs de la nouvelle politique sanitaire qui devrait rendre le Maroc plus souverain sur ce plan. Détails.



Souveraineté sanitaire : Comment le Maroc se prépare à la période Post-pandémie
Après deux ans d’assauts, la pandémie semble battre en retraite dans le monde entier, sauf en Chine et en Corée du Nord où elle semble renaître de façon étonnante. Au Maroc, la page semble tournée, bien que le gouvernement privilégie la prudence en maintenant l’état d’urgence sanitaire en vigueur.

Place maintenant aux enseignements à tirer de cette pandémie qui a bouleversé le monde entier et montré les vertus de la souveraineté sanitaire. Ce thème est érigé en politique d’Etat qui a pris conscience de l’importance du réinvestissement dans le secteur de la Santé. Ce sujet retient l’attention aussi bien des spécialistes que des politiques d’autant plus que le monde n’est pas à l’abri d’une nouvelle pandémie dévastatrice.

À la Chambre des Conseillers, un groupe thématique se penche sur cette question, en sollicitant l’avis des experts sur les contours de la nouvelle politique sanitaire du Royaume dans les années à venir où la souveraineté sera une composante fondamentale. Le groupe thématique, présidé par l’Istiqlalien Fouad Kadiri, tente d’entrevoir ce à quoi ressemblera la politique sanitaire du Royaume dans la période post-covid-19. Kadiri a estimé qu’il y a « un Maroc d’avant et d’après le Covid-19 », lors d’une réunion du groupe en présence du Secrétaire général du ministère de la Santé, Dr Meziane Belafkih, et de la représentante de l’Organisation mondiale de la Santé, Maryem Bigdeli.

Pour poser la problématique en termes clairs, mieux vaut définir ce que veut bien dire la souveraineté sanitaire. Un concept qu’on rencontre souvent, mais qui est défini au gré des interprétations des uns et des autres sans qu’il y ait une définition claire avec des objectifs précis.

« La sécurité sanitaire se définit ainsi comme l’ensemble des décisions, programmes et actions visant à protéger la population contre tous les dangers et les risques pour la santé considérés comme échappant au contrôle des individus et relevant donc de la responsabilité des pouvoirs publics », explique Tayeb Hamdi, Expert en politiques et systèmes de Santé, qui propose cinq pistes pour atteindre cet idéal, dont le renforcement du secteur public et l’ouverture sur les nouvelles technologies médicales.

Concernant l’approvisionnement, Tayeb Hamdi insiste sur le besoin impérieux de notre pays de diversifier ses sources d’autant que les deux premières années du Covid-19 ont poussé le monde entier à prendre conscience de l’ampleur de sa dépendance vis-à-vis de la Chine et de l’Inde où une grande partie de la chaîne de production mondiale est délocalisée. Il sied de rappeler ici le scandale afférent à AstraZeneca, dont le fabricant indien n’a livré au Maroc qu’une partie de la commande (6 millions 25 millions de doses), en plus du retard de livraison.

Libérer le potentiel de l’Industrie pharmaceutique

Pour toutes ces raisons, le Maroc n’a pas tardé à lancer sa propre industrie vaccinale en s’associant à des groupes internationaux tels que Sinopharm et le suédois Recipharm pour produire des vaccins 100% “Made in Morocco”. L’Usine de Benslimane, rappelons-le, est censée garantir les besoins vitaux du pays en matière de vaccins d’ici 2025, et lui permettre de devenir une plateforme d’exportation vers le reste du Continent africain.

En outre, la souveraineté sanitaire dépend également d’une industrie pharmaceutique marocaine performante, juge M. Hamdi. Ceci a pour objectif, continue notre interlocuteur, d’avoir une meilleure maîtrise nationale de l’ensemble de la chaîne de production et de distribution des médicaments et des dispositifs médicaux.

Actuellement, l’industrie nationale accumule une expérience considérable dans la production du médicament générique. Avec un réseau de 51 opérateurs nationaux et 47 sites de productions dans l’ensemble du Royaume, elle permet de satisfaire près de 78% des besoins du pays en termes de médicaments génériques et d’assurer plus de 50% du besoin en valeurs, selon les données de la Fédération Marocaine de l’Industrie et de l’Innovation Pharmaceutique (FMIIP). L’industrie nationale exporte 17% de sa production à l’étranger, soit près de 1,3 milliard de dirhams (chiffres de 2019).

L’enjeu de la couverture médicale

Cependant, avec la généralisation de la couverture médicale, la demande sur les médicaments devrait significativement augmenter, ce qui fait que l’industrie nationale aura du mal à répondre aux besoins futurs si elle n’augmente pas, dès maintenant, ses capacités de production et d’innovation.

À l’heure actuelle, cette mission s’apparente à un grand défi si on tient compte des difficultés de gestion de ce secteur par le ministère de la Santé, surtout en ce qui concerne les homologations et les autorisations de mise en marché. Le souvenir des respirateurs 100% marocains et les lits de réanimation, ainsi que l’épisode du test salivaire « Gigalab » n’est pas encore oublié.

Pour cette raison, la nouvelle politique pharmaceutique pour la période 2021-2025 a fixé comme objectif de remédier aux dysfonctionnements. La solution convenue avec les professionnels du secteur est d’instituer une Agence nationale de médicament. Une institution indépendante du ministère de la Santé, chargée de la gestion des autorisations. Il s’agit là d’une revendication ancienne de l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP).

Pas de ressources humaines, pas de souveraineté ?

Le système de Santé ne saurait subsister sans ressources humaines compétentes. Avec l’hémorragie de médecins et de chercheurs que connaît le pays actuellement, la tâche s’avère ardue. Les conclusions de la récente étude intitulée “Migration intention of final year medical students” sont fort inquiétantes. Cette étude publiée par des chercheurs marocains sur “European journal of public health”, nous fait savoir que 70% des étudiants en médecine ont l’intention de quitter le pays.

Donc, la bataille pour la souveraineté ne saurait être gagnée sans la valorisation du Capital humain local que l’hôpital, de quelques secteurs qu’il soit, ne séduit plus. Empêcher les gens de partir est autant nécessaire et vital que l’autonomie industrielle. Le gouvernement a certes esquissé une réforme dans ce sens en augmentant les salaires des médecins et en augmentant les capacités des Facultés de médecine. Ceci pourtant n’est que le début d’une lutte de longue haleine pour combler le déficit de 32.000 médecins qui manquent à l’appel.


Anass MACHLOUKH


Recherche scientifique : l’enjeu vital
 
Si l’industrie pharmaceutique est un enjeu majeur pour la souveraineté nationale, la recherche scientifique est tout aussi fondamentale.

Dans son rapport sur le droit à la Santé, le Conseil national des Droits de l’Homme a conditionné la souveraineté sanitaire par la promotion de la recherche scientifique. Le rapport a recommandé la hausse de l’investissement dans la recherche avec des incitations audacieuses pour les futurs chercheurs biologiques. Leur importance s’est avérée durant la crise du Covid-19 dans la course aux vaccins. Le CNDH a préconisé aussi un investissement plus conséquent dans la formation et l’augmentation des effectifs de médecins formés dans les années à venir.

Force est de constater que nous sommes encore loin de l’objectif de former 3000 médecins par an tel qu’envisagé en 2007 par le gouvernement Driss Jettou.
 








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