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Baignades en mer : Gare à la propagation des microalgues urticantes ! [INTÉGRAL]


Rédigé par Omar ASSIF Vendredi 4 Août 2023

Avec le réchauffement des eaux de mer et la propagation d’espèces invasives, les côtes méditerranéennes et atlantiques voient apparaître de nouvelles menaces pour les baigneurs.



Se baigner en mer puis se retrouver foudroyé par une éruption cutanée ou une réaction allergique plus ou moins sévères, un phénomène qui n’est pas anodin et qui pour la plupart des cas est attribué à un contact avec une espèce de méduse. Quid des cas où le baigneur en question est certain que la cause de son mal n’a rien à avoir avec le contact d’une méduse, mais devrait plutôt être cherchée ailleurs ? C’est le cas d’un nombre considérable de personnes qui ont vécu une (mauvaise) expérience de ce genre durant cet été sur certaines plages méditerranéennes et atlantiques. « Il m’arrive régulièrement de recevoir au cabinet des patients présentant des démangeaisons, une éruption cutanée érythémateuse, urticarienne ou eczématiforme suite à un bain de mer, surtout en période estivale. Il est très difficile de déterminer à quoi ces personnes ont réagi. Il existe tant de substances non identifiées dans certaines eaux de baignade qu’il est quasiment impossible de retrouver le coupable », écrit dans son blog Dr Guillaume Barucq, médecin français, auteur et adepte de surf.
 
Algues toxiques
 
Les eaux marines peuvent en effet receler une quantité significative d’organismes souvent invisibles à l’œil nu, ou encore par endroits, de polluants dont le contact avec le corps humain n’est pas sans conséquences. Cette situation complique la prise en charge des baigneurs qui présentent des réactions cutanées posant un véritable problème pour mettre en place des systèmes de veille préventive. Chaque été depuis 2021, la côte basque (en France) a cependant recensé plus de 900 cas de baigneurs qui ont développé des symptômes grippaux, des irritations cutanées ou des troubles gastriques, suite à leur fréquentation de la plage. L’ampleur du phénomène a cependant permis d’en identifier la cause grâce à la mobilisation des autorités locales et de leurs partenaires scientifiques. Il s’agit en l’occurrence de l’Ostreopsis, une microalgue d'origine tropicale qui prolifère surtout l'été, lorsque l'eau atteint une température de plus de 20°C. Identifiée sur les côtes méditerranéennes depuis une quinzaine d'années, cette microalgue prolifère d’une manière qui n’est pas encore très bien cernée par les scientifiques.
 
Qu’en est-il du Maroc ?

« C’est un phénomène qui est assez récent et qui est lié aux impacts globaux des changements climatiques, mais également à la circulation des espèces exotiques et invasives », explique Houcine Nibani, biologiste et président de l’Association de Gestion Intégrée des Ressources (AGIR). Un groupe de scientifiques marocains a cependant publié un article scientifique en 2022 qui se penche sur le suivi durant 18 mois des « efflorescences benthiques d'algues nuisibles » au niveau des côtes d’Oued Lihoud, Cap Malabata et Dalia. Les espèces-cibles de cette étude comptent trois microalgues parmi lesquelles se trouve l’Ostreopsis. La conclusion de ce travail souligne que les densités constatées de ces espèces « n'étaient pas différentes de celles enregistrées dans d'autres écosystèmes situés dans le Nord et le Sud de la Méditerranée », ce qui justifie de « mettre en place une surveillance régulière de ces dinoflagellés benthiques et de leurs biotoxines émergentes » afin de « protéger les écosystèmes marins et la santé humaine des risques potentiels ».
 
Canicules maritimes

À ce stade, la surveillance des eaux de baignade au Maroc n’implique pas d’établir la présence ou de faire le suivi d’organismes marins, potentiellement dangereux pour l’Homme. Cela s’explique notamment par le caractère aléatoire des efflorescences de méduses ou de microalgues dangereuses. L’augmentation des températures des eaux marines accentue cependant les risques de multiplication de ce genre de phénomène. Les scientifiques évoquent d’ailleurs des « canicules marines » aux écosystèmes marins dont l’intensité ne cessera d’augmenter avec toutes les altérations écologiques et les risques sanitaires que ce phénomène implique. « L’enjeu actuel est d’anticiper ces changements dont l’apparition de microalgues toxiques est un avant-goût. Pour mitiger ces risques, la recherche scientifique devra jeter des passerelles avec d’autres disciplines, notamment avec les sphères médicales, techniques et numériques », conclut Houcine Nibani.
 
 

3 questions à Mustapha Aksissou

Professeur de biologie marine à l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, le Pr Mustapha Aksissou répond à nos questions concernant la prolifération d’algues marines nocives.
Professeur de biologie marine à l’Université Abdelmalek Essaâdi de Tétouan, le Pr Mustapha Aksissou répond à nos questions concernant la prolifération d’algues marines nocives.
« Les algues envahissantes deviennent des milieux propices pour la fixation de microalgues potentiellement toxiques pour la biodiversité et pour les baigneurs »
 

Existe-t-il au Maroc un phénomène de prolifération d’algues maritimes nocives ?

- En effet, le trafic maritime dont l’intensité a considérablement augmenté ces dernières années a causé une accentuation en termes d’apparition de nouvelles espèces invasives marines, notamment les algues. Ce phénomène s’explique principalement par les mauvaises pratiques de déballastage qui font que des eaux issues d’écosystèmes marins lointains et charriant des espèces exotiques sont vidées dans d’autres mers et océans. Il existe actuellement près d’une dizaine d’espèces invasives d’algues marines qui prolifèrent dans la façade atlantique, mais le phénomène est encore plus accentué au niveau de la mer Méditerranée.

En quoi consiste la nocivité de ces algues marines envahissantes ?

- L’apparition d’espèces d’algues invasives peut avoir un impact négatif sur les milieux marins et littoraux. C’est également une nuisance qui détériore la qualité des plages qui sont touchées par ce phénomène. En se constituant sous forme d’amas, ces algues envahissantes deviennent des milieux propices pour la fixation d’un certain nombre de déchets, mais également de fixation de microalgues potentiellement toxiques pour la biodiversité et pour les baigneurs.

Quels sont les moyens de remédier à ce problème et d’en mitiger les conséquences ?

- Concernant le volet veille et prévention, il y a plusieurs institutions nationales qui œuvrent dans le domaine du suivi de la qualité sanitaire et écologique des écosystèmes littoraux. Cela dit, le caractère nouveau de ce phénomène qui est accentué par les impacts des changements climatiques impose d’intégrer ces nouveaux risques, notamment à travers l’amélioration de la coordination entre les parties prenantes concernées. Les universités et la recherche scientifique peuvent également participer à cette dynamique en jouant le rôle qui est le leur. Pour le volet curatif, les seuls moyens accessibles pour l’instant prennent la forme d’enlèvement mécanique des amas d’algues, ce qui diminue les risques et les nuisances potentiels qui peuvent subsister.

Allergies : L’eau de mer peut-elle devenir allergène pour certains baigneurs ?

Avoir une réaction cutanée suite à une baignade en mer est généralement dû à la présence dans l’eau de phytoplanctons, de micro-méduses ou encore de nombreuses substances invisibles présentes dans le milieu marin. Face à la même exposition, il arrive parfois que certaines personnes prédisposées ou ayant une peau particulièrement sensible soient plus touchées que d’autres. Si le sel présent dans l’eau de mer peut également parfois irriter la peau d’un baigneur, les spécialistes s’accordent sur le fait que l’être humain ne peut pas être « allergique à l’eau de mer », mais peut éventuellement développer une réaction à un ou plusieurs éléments qui y foisonnent. À l’heure actuelle, l’évaluation des eaux de baignade reste très partielle puisqu’elle n’englobe pas tous les polluants (chimiques et organiques) qui peuvent s’y trouver. Les réactions cutanées développées suite à une baignade en mer restent cependant majoritairement bénignes et ont tendance à disparaître au bout de deux à trois jours.

 

L’info...Graphie


Recherche : L’économie bleue face aux défis environnementaux émergents

L’emploi des nouveaux outils et connaissances, générés dans le domaine de la recherche scientifique appliquée aux milieux marins, s’avère une condition majeure afin de permettre de relever les défis liés aux impacts des changements climatiques. C’est également un moyen de construire une économie bleue qui intègre les enjeux de détérioration des écosystèmes marins et d’émergence de nouvelles menaces sanitaires et écologiques. C’est dans ce contexte que l’Association de Gestion Intégrée des Ressources (AGIR) hébergera, du 3 au 10 septembre 2023 à Al Hoceima, une université d’été sous le thème « Outils et applications innovantes pour une économie bleue ». Organisé dans le cadre du projet Iliad, cet événement prendra la forme de cours destinés aux étudiants diplômés (Master/PhD) et aux scientifiques en début de carrière dans les domaines de l'écologie marine, de l'océanographie, de la surveillance environnementale, de la télédétection, de l'ingénierie marine/océanique, de la science des données et de l'Intelligence Artificielle (IA). Cette université d’été connaîtra par ailleurs la tenue de conférences animées par des professionnels de haut niveau ainsi que des visites de terrain et des exercices pratiques au niveau du parc national d'Al Hoceima. L'université d'été organisera également des concours et un hackathon et s'achèvera par une cérémonie de remise des Prix. Les participants qui souhaitent prendre part à cet événement peuvent s’enregistrer à travers le site www.ocean-twin.eu.



Communication financière

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