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Interview avec Nadia Kounda: Une dimension d’amour et de passion


Rédigé par Meriem Lemrajni Mardi 7 Mai 2024

Dans ce film, Nadia Kounda s’intéresse à la passion mais surtout à la création d’un personnage et la volonté de briser les stéréotypes qui l'entourent. Elle croit fermement que n'importe quelle femme peut faire de la musique son métier, tout en reconnaissant que c'est un art qui demande du travail et de la pratique.



  • Votre interprétation récente de la « chikha » dans « Mon père n'est pas mort » a captivé l'audience lors du festival du film. Pourriez-vous nous en dire plus sur le film et partager avec nous comment vous avez appréhendé ce rôle si particulier ?
 
Je suis ravie que ce film ait rencontré un succès notable en remportant plusieurs Prix nationaux et internationaux. Son distinction au festival du film de Tanger ainsi que sa réception du Prix Azzeddine Meddour pour la première œuvre au Festival du cinéma méditerranéen de Tétouan (FCMT), qui s'est déroulé du 27 avril au 4 mai, témoigne de sa qualité indéniable. Je suis optimiste quant à sa continuation sur cette voie et son futur succès dans les salles de cinéma.
 
Concernant mon rôle de Leïla, une apprentie chikha qui se produit dans un cirque aux côtés de sa professeure chikha, j'ai trouvé particulièrement intéressant d'explorer le côté romantique de son histoire d'amour avec l'un des personnages du film. Cette dimension unique de l'histoire d'amour, différente pour chaque individu, a été un aspect que j'ai approfondi avec le réalisateur.

Sur le plan technique, pour ce qui concerne le métier de Leïla en tant que danseuse et chanteuse populaire, j'ai eu l'opportunité de rencontrer des professionnels du milieu, notamment Hajib, pour parfaire mon interprétation. De plus, j'ai eu la chance de fréquenter de près une chanteuse chikha avec qui j'ai pu échanger sur l'aspect psychologique du personnage. Bien sûr, j'ai également dû apprendre plusieurs pas de danse et mouvements spécifiques pour représenter au mieux le personnage et lui apporter une crédibilité maximale.
 
  • Comment ce rôle a-t-il été une opportunité révolutionnaire pour vous en tant que femme, en brisant les stéréotypes entourant la représentation des chanteuses populaires, qui parfois choisissent des chants porteurs de messages forts ?
 
Ce qui me passionnait le plus, c'était surtout la création de ce personnage et la volonté de briser les stéréotypes qui l'entourent. Je crois fermement que n'importe quelle femme peut faire de la musique son métier, tout en reconnaissant que c'est un art qui demande du travail et de la pratique.
 
Au-delà de cela, je voulais également explorer les histoires personnelles qui se cachent derrière chaque chikha : les histoires familiales, les histoires d'amour, les quêtes personnelles. C'est cela qui m'intéressait le plus, en plus de l'univers unique dans lequel évolue ce personnage, celui d'un cirque. J'ai trouvé fascinant d'explorer ces aspects plus profonds. J'ai donc concentré mes efforts sur la psychologie du personnage et sur sa propre quête personnelle, ce qui résonnait profondément en moi en tant que femme et artiste.
 
  • Comment avez-vous préparé votre interprétation, notamment en ce qui concerne le chant et la performance scénique spécifiques aux "chikhate" ?

Pour préparer mon personnage, je dois avouer que j'avais des doutes quant à ma capacité à être à la hauteur. Cependant, je me suis lancée en me rappelant que n'importe quelle femme pourrait faire de cet art son métier, car il s'agit à la fois d'un art, d'un travail et d'une performance : soit on réussit, soit on ne réussit pas. J'ai donc plongé dans cette expérience en décidant de donner tout ce que j'avais.
 
Cependant, Adil El Fadili, le réalisateur, ne voulait pas que l'on se concentre uniquement sur cela. Comme je l'ai mentionné, mon personnage est une apprentie chikha qui se produit en spectacle, ce qui m'a rassurée en me rappelant que je restais malgré tout une apprentie. Cela m'a permis de mettre moins de pression sur moi-même et m'a encouragée à accepter le rôle.

De plus, j'ai été soutenue par d'excellentes actrices crédibles, et avec du travail, je suis très heureuse de constater que cela a plu.

Pendant le processus de préparation, j'ai eu l'occasion d'explorer des scènes de « Thyar » (la danse des cheveux), une pratique ancrée dans ma culture et mes traditions festives. J'ai pu approfondir mes connaissances sur le « Thyar » grâce à Jihane Bougrine, qui m'a offert un coffret de Chikhate contenant des ressources historiques précieuses. J'ai également visionné des films et écouté attentivement les chants de Fatna Bent Lhoucine pour m'imprégner davantage de cette culture.

Pour moi, la Chikha incarne une aura particulière. Les chikhate sont véritablement fascinantes. Leur voix brisée témoigne du travail acharné qu'elles ont fourni et leur talent vocal est hors du commun. Pour moi, la chikha représente quasiment l'inaccessible. Aujourd’hui, on commence à donner à la Chikha sa juste valeur.
 
  • Vous avez une réputation pour aborder des sujets profonds qui résonnent avec la société. Comment voyez-vous la contribution de « Mon père n'est pas mort » à ce dialogue social ?
 
Il est possible que j'ai acquis la réputation d'être une actrice abordant des sujets profonds, mais je crois que cela découle du fait que le cinéma lui-même aborde ces thèmes, et que les films qui me sont proposés mettent en scène des personnages féminins rebelles, en quête de liberté et désireux de faire entendre leurs problèmes sociétaux.
 
En tant que femme marocaine ayant grandi au Maroc, ces histoires résonnent profondément en moi, car je fais partie de cette société et je partage les mêmes luttes et engagements envers moi-même et ma communauté. Lorsque je lis les histoires de ces jeunes femmes et mères que j'interprète, elles résonnent en moi, et j'ai donc à cœur de les porter à l'écran à chaque fois, car je comprends parfaitement ces personnages et leurs aspirations.
 
  • Pourquoi choisissez-vous de rester principalement dans l'industrie cinématographique plutôt que de faire des apparitions régulières à la télévision ?
 
Je suis souvent sollicitée pour des projets télévisés, mais les offres cinématographiques sont plus fréquentes, ce qui signifie que je me retrouve souvent engagée lorsque l'on me propose une série télé. Cependant, cela ne correspond pas toujours à mon emploi du temps chargé. Personnellement, je considère que les séries impliquent généralement trois mois de tournage, voire plus, ce qui nécessite de trouver du temps pour soi-même et pour la famille. Pour l'instant, le cinéma me permet de trouver cet équilibre dans ma vie.
 
  • Quel est le projet cinématographique sur lequel vous travaillez actuellement ?
 
J'ai récemment participé au tournage du dernier long métrage de Hicham Lasri, « Happy Lovers », ainsi qu'au deuxième long métrage de Yassine Fenane, « La Cigale, l'Intermédiaire et la Fourmi ». Dans le premier, j'incarne une femme attendant son premier enfant, tandis que dans le second, je joue le rôle d'une mère de deux enfants en attente de son troisième. C'est donc une exploration de la maternité au cinéma pour moi cette fois-ci. J'espère que ces deux films auront une belle vie en festival et en salles.
 
De plus, je viens de terminer le tournage du premier court métrage de Kenza Tazi, intitulé « Frères de lait », qui raconte l'histoire des mères donneuses de lait maternel à une époque où elles allaitaient les enfants dont les mères n'avaient pas suffisamment de lait ou les orphelins. C'était un projet très beau que j'ai adoré tourner à Fès.
 
  • Si vous deviez recommander un film qui vous tient à cœur, lequel serait-il ?
 
« La Vie est Belle » est un film qui me tient particulièrement à cœur, car il illustre comment, pendant la guerre, un père s'efforce de protéger son fils de la violence et de la cruauté humaines. Quant à « Blue Jasmine », le parcours du personnage, brillamment interprété par Cate Blanchett, m'a profondément marquée. C'est sans aucun doute un rôle que j'adorerais avoir un jour, explorant ainsi les thèmes de la folie et de la lutte contre celle-ci.
 








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